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Temporada : San Isidro - Madrid, Premières. (Compte-rendu de Pierre Nabonne) |
(27/05/2018) |
Enfin ! Il aura fallu attendre le 17° festejo pour enfin vibrer devant les corridas madrilènes de Las Ventas. Dans le mano a mano très attendu du jeudi 24 mai, El Juli et Ginés Marín n’avaient pu s’exprimer qu’en partie devant les deux premiers toros, hormis dans des quites enlevés qui montrèrent bien la rivalité latente entre le jeune lauréat de l’édition 2017 et le maestro entré dans sa 20° année d’alternative. Mais tout changea avec « Licenciado », le troisième, un Alcurrucén marron très bien charpenté. Julián López « El Juli » l’embarqua aussitôt dans trois passes par le bas genou ployé et dans plusieurs doblones majestueux qui soumirent totalement l’animal. La suite ne fut qu’harmonie parfaite entre l’homme et la bête, la muleta balayant le ruedo dans un vrai récital par séries de 5 ou 6 passes des deux mains liées dans un mouchoir de poche qui firent rugir la plaza entière. Les deux oreilles synonymes de Puerta Grande étaient largement acquises ; ne restait plus qu’à parachever le faenón. Hélas, l’épée ne rentra qu’à moitié et Julián en termina d’un descabello foudroyant qui lui valut tout de même un trophée archi mérité salué par une assistance en extase qui se réjouissait déjà à la perspective de la 3° prestation d’un tel maestro en plénitude. Malheureusement, la démonstration espérée ne put avoir lieu, le toro se blessant en début de faena. Dommage, mais après son apothéose sévillane El Juli avait une nouvelle fois démontré toute l’étendue de ses talents. Pour Ginés Marín, passer après lui relevait du défi. Le torero, 21 ans, s’attela à la tâche avec une telle conviction qu’il en récolta deux volteretas dont il sortit miraculeusement indemne et ce fut son picador Agustín Navarro qui recueillit tous les suffrages par deux piques d’anthologie. Oui, cette corrida laissera un grand souvenir à tous ceux qui ont eu la chance de la voir !
Car auparavant le long défilé de mastodontes ne transmettant pas la moindre émotion en avait, depuis l’ouverture du 8 mai, lassé beaucoup. Seuls Paco Ureña, toréant autant avec la tête qu’avec le cœur deux bons exemplaires du Puerto de San Lorenzo, le jeune Francisco José Espada pour sa première corrida de la saison, Antonio Ferrera doté d’une vraie personnalité de lidiador, Manzanares et Talavante fidèles à eux-mêmes, Luis David Adame plein d’allant et son grand frère Joselito très technique, Andrès Roca Rey aussi qui sut réveiller l’assistance se montrèrent capables, avec Sébastien Castella, de couper une oreille. Le Biterrois, liant de belles séries joliment enchaînées devant un Jandilla qui s’éteignit trop vite et l’obligea ensuite à un toreo de proximité qui fit frémir l’assistance avant d’en finir d’une bonne lame, séduisit une nouvelle fois Madrid. N’oublions pas non plus dans la répartition des trophées les rejoneadores Raúl Martín Burgos, Andrès Romero, Leonardo Hernández et les jeunes novilleros Toñete et Francisco de Manuel qui récoltèrent chacun une oreille.
Par contre, les 20.000 spectateurs eurent l’occasion de manifester une colère totalement légitime après qu’un président incompétent eut refusé au très valeureux Fortès une oreille qu’il avait cent fois méritée. L’Association nationale des Présidents de Plazas de Toros y alla même de sa note de Presse désavouant ce personnage dont on se demande encore ce qu’il faisait là, perché dans sa loge imbu de ses pouvoirs…Finalement Diego Ventura, le Portugais installé en Andalousie à la Puebla del Río fut, dimanche dernier, le premier capable de franchir la Grande Porte. Et cela pour la 15° fois, un record absolu qu’il ne tardera sans doute pas à battre, après les deux nouvelles oreilles totalement méritées par le brillant cavalier et ses montures dont le magnifique Nazarí. Alejandro Talavante et Alberto López Simón en firent de même vendredi soir devant des toros de Nuñez del Cuvillo intéressants dans l’ensemble, excepté le premier dévolu à Juan Bautista. Le quatrième était un peu meilleur et l’Arlésien déploya toutes les ressources de son impeccable technique pour sortir une excellente faena sous d’impressionnantes trombes d’eau. Il aurait certainement mérité une belle oreille s’il avait réussi son estocade a recibir au premier essai. Hélas pour lui qui est passé maître en la matière, l’épée ne rentra qu’à la seconde tentative, ce qui à Madrid ne pardonne pas. Les aficionados surent néanmoins reconnaître ses mérites en le faisant saluer au tercio sous des applaudissements nourris. Mais ce sont ses deux collègues du jour qui recueillirent tous les suffrages, Talavante lors d’une première prestation de haut vol primé par 2 oreilles, López Simón (totalement retrouvé) au prix d’une première faena quasi héroïque où il fut sévèrement secoué et d’une seconde plus aboutie qui lui valurent une et une oreille. Alors, espérons que la seconde partie de cette longue Feria de San Isidro (du nom du Saint Patron de la capitale madrilène) nous réservera encore de beaux moments jusqu’à son épilogue du 10 juin prochain.
Pierre Nabonne.
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