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| Temporada : Feria de Madrid : quatrième et dernière semaine.(Pierre Nabonne) |
| (15/06/2022) |
Nous avions vibré devant notre ordinateur en vivant les triomphes de Léa Vicens et de Guillermo Hermoso de Mendoza, le dimanche 29 mai. Il restait toutefois encore une semaine avant que la Plaza de Las Ventas ne referme ses portes sur l’édition 2022 de sa San Isidro.
Ceux qui apprécient prioritairement des cornes impressionnantes furent satisfaits par la présence des toros de Samuel Flores le lundi, mais leur comportement en piste déçut leurs admirateurs malgré tous les efforts consentis par Fernando Robleño et Morenito de Aranda.
Les armures des José Escolar du lendemain n’avaient rien à leur envier et Octavio Chacón et Alberto Lamelas (qui venait de triompher à Alès) durent faire appel à toute leur expérience des corridas dites dures pour enchaîner quelques séries méritoires. Noé Gómez del Pilar subit un sérieux accrochage à la fin de sa première prestation, mais il repartit au combat pour dessiner de magnifiques naturelles à pieds joints, de face, avant de s’engager dans une impeccable estocade qui lui valut la seule oreille de la soirée. Il partit défier son second adversaire à sa sortie du toril mais le fauve avait vu sa proie et il ne lui laissa aucune chance. Les mains expertes du docteur García Padrós et son équipe étaient déjà prêtes à intervenir pour l’opération d’urgence avant son départ pour l’hôpital le plus proche où il se remet d’une sérieuse cornada. Octavio Chacón, chef de lidia, prit alors le relais pour en finir laborieusement avec le toro.
Le lot d’Alcurrucén du mercredi 1° juin, en présence du roi Felipe VI pour la corrida dite de la Beneficencia (de Bienfaisance), d’un comportement assez inégal, permit à Morante de la Puebla d’exprimer toute la magie de son répertoire dans une faena qui sera ensuite consacrée comme la meilleure de la Feria face au quatrième dont le maestro obtint une oreille grandement méritée après un bon coup d’épée suivi du descabello libérateur. Si Ginés Marín resta dans une très honorable moyenne, la maîtrise souveraine étalée par El Juli aurait dû lui valoir sa récompense, mais l’épée le trahit une nouvelle fois.
Le lendemain le jeune Rafael González, auquel Juan Leal venait de conférer l’alternative, donna lui aussi du travail à l’équipe médicale des arènes avec 20 centimètres de corne dans la cuisse après avoir été pris en fin de faena. Notre Arlésien préféré, plus expérimenté que le Péruvien Joaquín Galdós, en finit rapidement avec le premier toro de Fuente Ymbro mais trois autres l’attendaient encore, en alternance avec son compagnon de cartel. Et Juan (Steven pour notre Etat civil) s’en sortit avec tous les honneurs, obtenant même une oreille de son premier après une magistrale série de la gauche précédant une spectaculaire estocade. Les deux autres toros ne lui permirent pas de s’exprimer davantage dans ce registre classique qui plaît tant à Madrid, mais son répertoire au plus près des cornes lui valut aussi de chaleureuses ovations.
Il ne restait donc que trois corridas pour en terminer avec cette longue série de 29 tardes en continu. Celle du vendredi 3 juin connut un magnifique final avec un Tomás Rufo qui confirma tout le bien que l’on pense de lui devant le dernier exemplaire du Puerto de San Lorenzo qui lui permit d’exprimer son jeune talent avant d’en terminer d’une estocade sin puntilla. Pourquoi la présidence n’accorda-t-elle pas les deux oreilles unanimement demandées, le tiercé siégeant au palco imbu de ses pouvoirs est seul à le savoir…Si Manzanares et Alejandro Marcos ne trouvèrent guère matière à s’exprimer devant des adversaires un peu trop faiblards, ce sixième toro et son matador (lequel avait été pourtant sérieusement secoué auparavant par une bête s’acharnant à lui enlever sa cravate) nous firent totalement oublier tout ce qui avait précédé.
Les très sérieux Adolfo Martín du lendemain permirent à Rafaelillo, que l’on avait un peu oublié après la grave blessure reçue ici-même, de s’illustrer pleinement face à son premier dans des séries des deux mains pleines de maîtrise avant d’en terminer par une estocade qui sera considérée comme la plus aboutie de toute la Feria. Espérons que l’oreille, très justement accordée à ce torero des plus méritants, lui permettra de relancer totalement sa carrière. Manuel Escribano écouta lui aussi de belles ovations…et Talavante les sifflets qui accompagnèrent généralement trois de ses quatre comparutions madrilènes. Pour lui, il serait temps de retrouver la maîtrise d’avant son retrait, et le déclic tant attendu allait survenir à Aranjuez puis à Nîmes le lundi de Pentecôte avant que Tomás Rufo, toujours lui, ne gracie le dernier toro de la Feria gardoise.
A Madrid le rideau s’était baissé la veille, le dimanche 5 juin avec un lot de Victorino Martín pas facile mais aussi un peu mièvre parfois, devant lequel Antonio Ferrera et Román ne parvinrent pas à s’illustrer particulièrement. Il en fut tout autrement de Sergio Serrano, très à l’aise face au second, le magnifique Garañuelo de 5 ans et plus, 562 kilos sur la bascule (qui sera déclaré meilleur toro de la Feria) qui le secoua pourtant durement à son entrée en piste. Il s’en sortit sans trop de mal et il se mit à l’ouvrage pour instrumenter plusieurs bonnes séries avant d’échouer aux aciers.
La chance était passée, mais nous n’oublierons pas tous les bons moments que cette Feria de San Isidro 2022 nous a réservés, les révélations d’Angel Tellez et de Tomás Rufo, la plénitude d’El Juli et de Roca Rey, la suprême élégance de Morante, le pundonor de Gómez del Pilar, Joselito Adame, Ginés Marín, Juan Leal, Rafaelillo, Román et autres, l’envie d’y arriver manifestée par les jeunes novilleros, le grand spectacle donné par Fernando Sánchez à chaque paire de banderilles, par Léa Vicens et Guillermo Hermoso de Mendoza à cheval.
Oui, la temporada promet d’être belle !
Pierre Nabonne.
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