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| Temporada : Madrid, 12 octobre 2025 : un dimanche pour l’Histoire (Pierre Nabonne) |
| (16/10/2025) |
En fait, tout avait commencé la veille avec le dévoilement de la statue située face à la porte principale de Las Ventas dédiée à la mémoire du grand torero madrilène Antonio Chenel « Antonête » décédé en 2011, auteur d’un grand moment de tauromachie le 15 mai 1966 face à « Atrevido », un toro d’Osborne presque aussi blanc que la célèbre mèche de cheveux de l’illustre maestro. Pour financer l’œuvre monumentale du sculpteur Martin Lagares haute de plus de 2 mètres, José Antonio Morante Camacho, dit « Morante de la Puebla » s’était dévoué corps et âme pour mettre sur pied un festival taurin avec la présence effective en piste à ses côtés de certains de ses anciens frères d’armes, Carlos Escolar « Frascuelo », Curro Vazquez (74 ans, déjà), Cesar Rincón (60 printemps, citant son novillo de loin comme à ses plus beaux jours), Enrique Ponce toujours très fringant, le rejoneador Pablo Hermoso de Mendoza convié à ouvrir le bal, la prometteuse novillera Olga Casado étant invitée à clôturer brillamment cette séance qui restera dans les mémoires de tous les assistants. Le public ne s’y était d’ailleurs pas trompé, les arènes étant pleines à l’heure du paseo, dimanche midi. Et tendidos et gradins eurent tout loisir de s’enthousiasmer devant la maîtrise affichée par tout ce beau monde. Mais pour Morante la journée ne faisait que commencer. Après un court moment de répit il lui fallait déjà se préparer pour la dernière corrida de la Feria d’automne madrilène. Après la confirmation d’alternative de Sergio Rodriguez, son premier adversaire (les six, de l’élevage de Garcigrande) ne lui permit pas de s’illustrer particulièrement mais son second lui infligea une sévère voltereta alors qu’il le toréait à la cape. Il retomba lourdement au sol et la crainte d’une lésion aux cervicales traversa notre esprit. Pendant qu’Ivan Garcia s’employait à éloigner le toro, on amena Morante au callejón inerte. Quasi miraculeusement il se reprit très vite pour repartir courageusement au combat et administrer à « Tripulante », 554 kilos bien répartis, plusieurs intenses séries de belle allure terminées par une estocade jusqu’à la garde. Aussitôt les 23.000 assistants demandèrent les deux oreilles et la présidence ne se fit pas prier pour les accorder. C’est alors que survint l’impensable. Alors que Morante terminait sa vuelta triomphale, il se dirigea vers le centre du ruedo les larmes aux yeux, non pas pour un dernier salut mais pour défaire sa coleta, cette mèche qui est le signe distinctif des toreros. La surprise était totale, l’incrédulité générale ! Quelques jours ont passé et nous avons encore du mal à réaliser mais pour lui c’était bel et bien fini, on ne reverra certainement plus en habit de lumières l’un des plus grands toreros de l’époque contemporaine. Dur, dur…. Pour Fernando Robleño qui avait annoncé de longue date que ce serait sa dernière corrida après 25 ans d’alternative (conférée par un certain Morante de la Puebla, 21 ans à l’époque) passer après un tel coup de Trafalgar s’avérait très délicat. Pourtant, après une carrière bien remplie qui lui a fait affronter les toros des ganaderías réputées comme les plus difficiles à Céret, Vic-Fezensac et autres plazas des plus toristas, ses adieux furent parfaitement réussis. Après une excellente faena, seul un pinchazo précédant un excellent coup d’épée qui lui valut une oreille largement méritée le priva d’accompagner Morante pour sa sortie a hombros par la Grande Porte, accompagnée par toute une nuée d’admirateurs. Mais José Antonio emporté par la foule, guetté par les caméras et les portables, semblait déjà ailleurs, comme ayant du mal à réaliser que cette fois c’était véritablement terminé … Pour lui l’histoire s’arrêtait donc là. Un événement qui restera dans les annales venait de se produire, et pour beaucoup d’entre-nous il restera certainement inoubliable. Pierre Nabonne.
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